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Poéticomiquement (une lettre au public de J.-L. Fornelli)

Afin de saluer le festival de poésie comique qui aura lieu ce week-end, poesieromande.ch a proposé à Jean-Luc Fornelli, son organisateur, de vous envoyer une lettre ouverte pour préparer les zygomatiques.

 

Cher public espéré,

Vendredi, c’est enfin la première des deux soirées Poesia Comica à Montreux. Quel trac ! Ça me fait tout drôle ! Une kyrielle de brillants poètes – de renom ou non, mais surtout de renom – brûlent de vous « jouer » leurs poésies les plus divertissantes. Toutes et tous ont répondu « oui » à mon invitation : enthousiasmés. Malgré le côté farfelu du projet : déclamer des poésies humoristiques. Ces drôles de poètes, ces poètes comiques, une dizaine par soirée, auront entre 5 et 7 minutes pour vous faire rire, mais pas que… évidemment. Et même en romanche. Le public (en l’occurrence vous) répondra-t-il présent ? Je ne sais même pas si Dieu seul le sait ?

L’idée, pour ne pas dire l’illumination (!), m’est venue en août dernier, après avoir vu deux magnifiques spectacles de poésies au CAC de Genève (c’est pas joli l’acronyme de Centre d’Art Contemporain, mais on ne choisit pas ses initiales…). Le public n’était pas nombreux – euphémisme – mais qu’est-ce qu’ils ont été gâtés ces happy few, très gâtés même, chanceux carrément, à mon sens, osons-le : tellement c’était beau ! Je me suis dit que ce n’était pas possible de rater quelque chose d’aussi bien, d’aussi accueillant, d’aussi drôle, d’aussi touchant, d’aussi fin, d’aussi bon, subtil, ambitieux, d’aussi émouvant, d’aussi simple et d’aussi fort à la fois. Tout le monde devrait avoir le plaisir de voir ça ! Peut-être que la faible affluence était due au fait que la poésie a cette aura de sérieux, d’ennui, de préciosité, de complexité, de désespoir, d’hermétisme qui l’entoure. Je me suis dit comment casser la pénible image qu’elle se coltine, qui — même si elle n’est pas toujours fausse, hélas… — fait l’impasse sur les aspects les plus ludiques, les plus amusants, les plus divertissants du genre. Car oui, Mesdames, Mesdemoidames, Messieurs, la poésie peut être drôle : hilarante même et volontairement en plus ! D’autant qu’il y en a mille et deux sortes.

Et hop : l’idée a jailli, comme la pâte dentifrice hors de son tube qui tombe direct dans le lavabo après un trop bref passage sur les poils de la brosse à dent – jamais métaphore n’a été aussi longue, je crois, pour signifier un jaillissement… Eurêka : mélangeons donc humour et poésie ! Puisque l’humour est porteur, paraît-il. On verra bien. Sans oublier qu’un brunch nocturne sera offert, à 21h45, ainsi que le premier verre, pour que les poètes et le public fassent plus ample connaissance. Du pain, du vin et des poèmes : c’est aussi bien que des jeux, non ?

À quelques heures des trois coups d’envoi : les réservations battant leur plein, j’aime à penser que le pari est gagné pour ce premier soir… Je touche du Bois, qui m’en colle une en retour direct.

Jean-Luc Fornelli